Suite aux mesures de confinement prises en mars pour enrayer l’épidémie du COVID-19 en France, comme beaucoup de secteurs, celui de l’immobilier a connu deux mois d’arrêt complet. C’est seulement le 11 mai que les premières agences ont pu rouvrir leurs portes, et encore, ces réouvertures se sont accompagnées de restrictions, notamment avec le télétravail et la prise de rendez-vous en agence réduite au strict minimum. L’immobilier se remet timidement en marche, avec une certaine crainte pour toutes les parties concernées : vendeurs, acquéreurs et locataires au premier plan.
Beaucoup s’interrogent sur une baisse considérable des prix avec en arrière-plan une nouvelle crise pour un secteur pourtant prometteur deux mois auparavant.
UNE NOUVELLE CRISE SIMILAIRE A CELLE DE 2008 ?
En 2008, ce n’était pas un virus mais bien une crise économique mondiale, provoquée par des placements financiers douteux, qui avait fait chuter le cours du marché de l’immobilier. En France, la crise dans ce secteur a vite fait son apparition : il se contracte de 30% en passant de 800.000 ventes en 2007 à près de 550.000ventes en 2008. Du jour au lendemain, les banques se sont montrées plus frileuses à accorder des prêts à des particuliers peu solvables, ce qui a provoqué une augmentation significative des refus de crédit immobilier. Ajouté à cela une baisse de la demande, une augmentation des délais de transactions, le marché s’est vite trouvé saturé, ce qui a tiré les prix vers le bas. Ce n’est que trois ans plus tard, en 2011, que le secteur a retrouvé le même nombre de ventes qu’en 2007, à savoir 800.000 ventes. Il est à noter que ceci a été possible en partie grâce au plan de relance massif du gouvernement de l’époque.
Comparé à la crise de 2008, le confinement n’a en somme pas grand-chose en commun avec celle-ci. À la différence près que dans les causes de la crise, on retrouve les mêmes facteurs psychologiques, à savoir la peur des acquéreurs de se lancer dans un projet sans vision claire de l’avenir, et la réticence des banques à faire des crédits à des clients peu solvables.
TOUT DU MOINS, Y AURAIT-IL UN RALENTISSEMENT DU SECTEUR DE L’IMMOBILIER EN 2020 ?
Il est très probable que les performances ne soient pas celles espérées encore en début d’année. Il est à prévoir par exemple que les transactions -qui avaient dépassé le million en 2019- vont se rétracter à 800.000 en 2020. Certains professionnels voient déjà leurs transactions passées ralentir, même si c’est moins le cas dans les grandes métropoles comme Paris ou Lille, où le marché est plus tendu.
Les prix devraient tout du moins se stabiliser et ne plus poursuivre leur hausse spectaculaire. En effet en décembre 2019, un article du Figaro faisait un point sur la hausse des prix en France métropolitaine et faisait le constat d’une « explosion des prix » dans certaines villes comme Bordeaux, où le prix au mètre carré a bondi de 79% en 10 ans. Il était alors à prévoir une poursuite de hausse des prix pour l’année 2020, « à moins d’un évènement économique majeur ». Ainsi, depuis la crise du coronavirus, ces prévisions de poursuite de hausse des prix sont mises à mal. Toutefois, cela ne signifie pas pour autant qu’il y aura une chute des prix et donc une crise, mais simplement une stabilisation des prix.
VERS UNE BAISSE DES PRIX DE L’IMMOBILIER POUR LES ANNEES A VENIR ?
C’est ce que prévoit l’agence américaine S&P en 2020 pour l’Europe, avec un scénario des prix dit en « U ». La plupart des pays européens vont voir leur prix de l’immobilier à la baisse, même si celle-ci reste limitée pour des pays comme la France, pour qui la baisse ne serait que de l’ordre de 1,4% cette année, après avoir grimpé de 4% en 2019. Les prix devraient continuer à diminuer avant de repartir à la hausse à l’horizon 2022. Cette baisse des prix sur 2 ans ne devrait s’agir que d’une simple « correction », avant de retrouver le chemin de la croissance.
Certains professionnels voient déjà un retour « spectaculaire » des vendeurs et des acquéreurs sur le marché. Laurent Vimont, président de Century21, s’est dit « impressionné » par ce qu’il se passe actuellement sur le marché. 100 nouvelles offres d’achat ont déjà été déposées dans son réseau et le trafic du site internet a repris le niveau « d’avant le confinement ». Il précise que cela ne pourrait être qu’un feu de paille et que cette reprise spectaculaire peut s’expliquer par le fait que les transactions qui se font actuellement sont en réalité des transactions qui auraient dû se faire pendant le confinement. De son côté, Yann Jéhanno, président de Laforêt dit avoir retrouvé une activité à 90%, mais précise qu’il faudra attendre septembre pour confirmer une tendance durable.
Grossemy Eric, chef de projet chez Skema Conseil, antenne de Paris.