La mobilité est le vecteur de la croissance économique comme du développement humain. Elle est synonyme de santé, de bien-être ainsi que de dynamisme. La mobilité s’applique aux personnes, aux marchandises et aux flux de données immatérielles. Elle répond avant tout à un besoin et s’adapte à l’évolution des modes de vie.
La mobilité fait partie de l’ADN des centres urbains. La concentration des populations comme des activités économiques va de paire avec différentes échelles d’interconnexions. Concernant le transport des personnes, une véritable refonte des systèmes est à l’œuvre, engageant les citoyens, les pouvoirs publics et les entreprises innovantes.
Aujourd’hui, l’usage de la voiture individuelle est remis en question en raison des problèmes d’engorgement et de pollution qu’il génère. Parmi les grandes mégalopoles, Londres a mis en place dès 2005 un système de péage routier aux portes de la ville qui impose un droit d’entrée pour la plupart des véhicules. La question est devenue mondiale : les taux de pollution alarmants des grandes agglomérations chinoises en témoignent. La ville de Paris a d’ailleurs pris le problème à bras le corps en interdisant depuis 2016 la circulation des véhicules immatriculés avant 1997.
Le futur de la mobilité urbaine s’oriente donc vers des solutions partagées et collectives. Celles-ci s’articulent autour de trois axes du développement durable répondant aux problématiques de la ville.
Il apparaît essentiel de se défaire des énergies carbone, pour les remplacer progressivement par l’électrique ou d’autres énergies vertes. La motorisation par hydrogène ou les biocarburants est régulièrement évoquée comme une solution d’avenir mais, à l’heure actuelle, c’est bien le transport électrique qui semble avoir la plus grande capacité de développement. La RATP lance par ailleurs cette année un appel d’offre massif de bus électriques dans le cadre de son projet « Bus 2025 » (flotte 100% écologique à cette échéance).
Bien qu’il soit impossible de prédire si, à très long terme, la voiture individuelle va disparaître, la voiture électrique s’impose aujourd’hui comme étant bien plus qu’une alternative. Comme l’explique Patrick GAGNOL, chef de projet EDF Mobilité, plus de 100 000 véhicules électriques roulent déjà quotidiennement en France. Il faut également noter que le transport électrique n’est pas simplement circonscrit à la ville et qu’il se développe aussi dans les zones rurales (principalement via des véhicules de tourisme ou des véhicules légers).
Concernant les moyens de recharge des batteries de ces véhicules électriques, il existe depuis 2015 un cadre légal définissant les conditions de pose et d’équipement. Ainsi, tout immeuble neuf doit être équipé d’un système de charge adapté à différents véhicules électriques (plusieurs types de prises, avec des intensités électriques différentes).
Une autre question est le coût de la recharge. Une possibilité est la vente de la recharge, notamment avec l’opportunité d’avoir des stations-service électriques (sur le modèle des pompes à essence actuelles). En vente à 9€ en Allemagne, elles ne pourront dépasser le prix de 6€ en France. Les Français ne sont en effet pas prêts à payer pour recharger leurs batteries électriques et considèrent encore cette source énergétique comme gratuite. Cette somme est cependant largement insuffisante pour couvrir les coûts de mise en service et de maintenance des installations. Un changement des mentalités doit donc s’imposer à l’avenir.
Ainsi, la mobilité électrique est une mobilité d’aujourd’hui qui prépare d’ores et déjà l’avenir. D’ici à quelques années, l’autonomie des véhicules électriques devra dépasser les 800 km, soit le double de l’autonomie actuelle.
En parallèle de la mobilité électrique, la performance croissante des outils technologiques et des algorithmes de calcul laisse entrevoir une nouvelle forme de mobilité : une mobilité autonome. Le conducteur perd son rôle de pilote du véhicule, devenant un simple passager conservant seulement une fonction de contrôle et de mise en route du trajet. Une nouvelle fois, cette mobilité peut être collective comme individuelle.
C’est d’ailleurs l’un des principaux axes des constructeurs en matière de recherche et de développement. Ainsi, les grands noms de l’industrie automobile allemande Daimler et Bosch ont annoncé en avril une coopération dans les voitures robots, capables de rouler sans l’intervention du conducteur. “Les deux entreprises ont conclu un accord de coopération en matière de développement pour mettre en circulation des véhicules pleinement automatisés (niveau 4) et sans conducteur (niveau 5) dans un environnement urbain au début de la prochaine décennie”, ont-ils indiqué dans un communiqué, en faisant référence à l’échelle mesurant l’autonomie du moyen de transport.
Le véhicule autonome, s’il est encore absent de nos routes, se matérialise peu à peu. Le groupe Transdev, un des leaders mondiaux de la mobilité offrant des solutions de transports collectifs dans plus de 19 pays sur les cinq continents, a fait du véhicule autonome l’un des piliers de son développement, et ceci dès 2005. Aujourd’hui, l’entreprise, dans un cadre encore expérimental, met à disposition des passagers des navettes autonomes capables de se déplacer sur un trajet prédéfini. La navette, équipée de capteurs laser placés à environ 15cm du sol se déplace en étant constamment en interaction avec son environnement. Si la vitesse et l’autonomie de ces véhicules sont encore insuffisantes pour combler nos besoins quotidiens, cette technologie est amenée à se développer pour garantir à terme une sécurité routière quasi infaillible.
La législation va d’ailleurs dans le sens d’une plus grande autonomie des véhicules. En août 2016, le conseil des ministres a officiellement autorisé, à travers une ordonnance, les expérimentations des “voitures à délégation de conduite” sur les routes françaises.
Selon le compte-rendu officiel, les véhicules autonomes “sont une étape incontournable vers une mobilité apaisée, une régulation et une sécurisation des trafics, et des transports plus efficaces et plus respectueux de l’environnement” et “constituent l’avenir de l’industrie automobile“.
Les voyageurs et passagers ont de plus en recours à des applications mobiles dans le cadre de leurs déplacements pour s’orienter, payer leurs titres de transport, etc. Les exploitants entendent accompagner cette transition vers la « mobilité digitale » à travers des services de conseil auprès des autorités organisatrices tout en améliorant l’expérience client à l’aide de nouveaux outils.
Parmi ces outils numériques, les applications mobiles de covoiturage ont le vent en poupe. GOVOIT, l’une d’elles encore en phase de développement, veut répondre au problème toujours existant de l’engorgement des cœurs urbains.
En effet, les modes de transports qui se veulent aujourd’hui innovants ne répondent toutefois pas à la question des deux extrémités d’un trajet, entre le point de départ et d’arrivée du mode de transport. Le premier et le dernier kilomètres sont toujours les deux distances qui posent problème puisqu’ils sont souvent difficiles d’accès, notamment par exemple pour les membres d’un covoiturage lorsqu’il s’agit de se retrouver. Un point de rendez-vous unique oblige souvent les membres du covoiturage à utiliser un moyen de transport complémentaire pour l’atteindre. Pour les transports publics, le problème reste le même, mais est cette fois ci conjugué à l’enjeu du déploiement sur le territoire. Couvrir le plus de zones de population possible est une nécessité sociale, même s’il apparaît évident que des choix doivent s’opérer pour mettre des arrêts de bus et de métro à disposition des populations. Ainsi, beaucoup d’usagers doivent marcher ou emprunter un moyen de transport supplémentaire pour atteindre le lieu de départ ou d’arrivée du moyen de transport principal.
GOVOIT, à la différence des plateformes actuelles, propose à tous les conducteurs et passagers une solution de covoiturage porte à porte, afin de s’attaquer justement à la congestion du trafic mais aussi de résoudre la question de la sécurité des personnes. La sécurité serait assurée par un suivi en temps réel. Des algorithmes spécifiques sont alors mis en place pour calculer les temps de trajet et fournir des informations. Si beaucoup d’utilisateurs sont inquiets face à la géolocalisation qui peut potentiellement nuire aux libertés individuelles, ce point n’inquiète pas Jean-Marie CARRARA, son créateur. Selon lui, « ce qui importe pour les utilisateurs, ce n’est pas d’être simplement géolocalisés, c’est aussi de garantir que leurs données ne soient pas divulguées ou réutilisées. » GOVOIT envisage donc de garantir le total anonymat des données de leurs utilisateurs.
Ainsi, trois enjeux majeurs du développement durable que sont la transition écologique, l’autonomie croissante de la technologie et le développement de solutions numériques se retrouvent bien dans les problématiques actuelles et futures de la mobilité, particulièrement urbaine. Le secteur du transport est ainsi à la fois économiquement porteur tout en conservant également un rôle majeur sur le plan social et du développement humain. Il est impossible de se prononcer sur le modèle de transport qui s’imposera dans le futur. Nous pouvons toutefois affirmer que la mobilité soulève d’immenses potentialités. Si, comme le dit Peter DRUCKER, « le meilleur moyen de prévoir le futur, c’est de le créer », il s’agit bien de travailler main dans la main avec les acteurs de l’innovation pour, dès aujourd’hui, penser demain.
Rédigé par Ferruccio Fleges, Chef de projet à Skema Conseil Lille.