L’Intelligence artificielle, « la quatrième révolution industrielle », créatrice d’emploi…
C’est un des sujets contemporains les plus controversés. L’intelligence artificielle s’installe petit à petit dans notre quotidien et sera prépondérante à l’avenir. Elle est à la fois source de promesses et de craintes. Comme à l’image de toutes les grandes révolutions industrielles, elle aura à n’en pas douter des conséquences sur l’emploi de demain. Elon Musk, le milliardaire américain et fondateur de Tesla et de Space X, prédit le pire des scénarios pour le monde du travail, dans lequel seule une poignée d’emplois seront laissés aux êtres humains. A l’opposé, Marc Zuckerberg patron de Facebook, y voit l’eldorado de demain avec une I.A aux services de l’humanité !
L’intelligence artificielle va-t-elle être destructrice pour le monde du travail en phagocytant une grande partie des emplois ? Certains y voient même la religion de demain ! Alors Enfer ou Paradis ?!
S’il est clair que certains emplois vont disparaître, il ne faut pas non plus croire que le monde du travail va devenir apocalyptique. Cependant selon le rapport de Dell et d’un think tank californien, 85 % des emplois qui existeront en 2030 n’existent pas encore aujourd’hui ! A l’image de ce qui s’est passé avec la révolution industrielle, l’intelligence artificielle va certes détruire des emplois, mais elle va en créer d’autres. Selon une autre étude dévoilée par la firme américaine Cognizant Technology Solutions Corp. l’intelligence artificielle pourrait créer 21 millions d’emplois nouveaux tels que des « agents de la diversité génétique », des « sherpas de magasin virtuel », ou encore des « conservateurs de la mémoire personnelle » … Ces intitulés de métiers venus tout droit de la science-fiction pourraient devenir réalité.
… engendrant des bataillons de travailleurs inutiles…
L’IA va avoir des incidences sur l’emploi bien moins idylliques que certains ne l’imaginent. Laurent Alexandre, auteur de La Guerre des intelligences. Intelligence artificielle versus intelligence humaine, prédit que le niveau d’exigence d’intelligence artificielle atteindra des niveaux si élevés que même si l’on se doute que les métiers routiniers, les plus répétitifs et les moins valorisants , seront pris en charge par des robots dotés d’IA, cette spectaculaire progression menacera des domaines et des activités qui paraissent particulièrement protégés comme les professionnels de la santé, par exemple.
Pour l’essayiste Yuval Noah Harari, l’IA va créer des « bataillons de travailleurs inutiles », qui seront remplacés par des robots truffés d’IA. L’auteur de Homo Deus. Une brève histoire de l’avenir, n’hésite pas à parler de « classe inutile » pour toutes celles et tous ceux qui ne parviendront pas à faire mieux que ce que peut proposer l’intelligence artificielle. Une vision apocalyptique où il faudrait gérer des « hordes de naufragés du numérique » et inventer de nouveaux métiers.
En France, l’IA est de plus en plus prise au sérieux par les politiques. Un des premiers rapports intitulés France I.A, pose dès lors la question d’un usage éthique. Cette problématique constitue tout l’enjeu de la mission qui a été confiée au député et mathématicien Cédric Villani.
Pour C. Villani, ce sont les métiers médians qui vont disparaître, les emplois les plus qualifiés parviendront en revanche à s’adapter.
En d’autres mots, le marché du travail connaîtra un dualisme radical, opposant les élites créant de la valeur à des masses de travailleurs très précarisés, voire tout simplement inemployés.
… tout en ayant des effets bénéfiques sur l’emploi?
Dans l’étude Predicts 2018 : AI and the future of work, le cabinet de conseils Gartner prédit que dès demain, l’IA créera 2,3 millions d’emplois et en détruira 1,8 million. Et c’est à partir de cette date que l’IA va avoir un effet bénéfique sur l’emploi.
Svetlana Sicular, vice-présidente de la Recherche chez Gartner se veut quand même rassurante : « Malheureusement, la plupart des alertes sur les pertes d’emplois favorisent la confusion entre l’IA et l’automatisation, en oubliant le principal atout de l’IA, l’intelligence “augmentée” — une combinaison entre l’intelligence humaine et artificielle, qui se complètent l’une et l’autre [… ]c’est le moment d’enrichir les emplois, d’imaginer de nouveau les tâches anciennes et de créer de nouvelles industries ».
Mike Rollings, vice-président de Gartner ajoute que « L’IA peut assumer des tâches répétitives et banales, libérant les humains pour d’autres activités, mais la symbiose des humains avec l’IA sera plus nuancée et nécessitera un réinvestissement et une réinvention au lieu de simplement automatiser les pratiques existantes. »
En effet, l’IA va améliorer la productivité de nombreux métiers, en éliminant des millions d’emplois à faible ou moyenne valeur ajoutée, mais en en créant parallèlement des millions d’autres emplois dans des secteurs à forte valeur ajoutée. Les entreprises devront transformer leur culture pour la rendre rapidement adaptable aux opportunités et aux menaces liées à l’IA.
De plus, selon les calculs de Gartner, en 2021, l’IA générera 2 900 milliards de dollars et permettra de gagner 6,2 milliards d’heures de travail et d’ici 2022, un travailleur sur cinq engagé dans des fonctions non répétitives sera en rapport avec l’IA.
Jean-Gabriel Ganascia, président du comité d’éthique du CNRS et auteur du livre Le mythe de la singularité, faut-il craindre l’intelligence artificielle ? nous explique que : « la machine qui remplace l’homme dans ses tâches est un vieux mythe, c’est à l’homme de s’adapter et de faire face à cette transformation du travail. Il ne va en aucun cas disparaître ! »
Il est évident que l’IA ne pourra pas être omnisciente et omnipotente. Elle aura besoin d’être supervisée par les êtres humains pour que ce travail collaboratif soit le plus efficient possible.
Malgré des annonces toujours plus surprenantes sur les performances de l’I.A et l’extension de son champ d’application, les robots sont encore très loin de pouvoir accomplir les tâches d’un cerveau humain. Ils ne sont que des outils et dans une moindre mesure des assistants. Les progrès à réaliser sont encore nombreux avant qu’une IA puisse comprendre le besoin spécifique d’une personne, sa psychologie, faire l’analyse d’une situation singulière, délivrer un conseil, décider ! L’intelligence humaine garde encore ces prérogatives.
Nous pouvons en avoir peur ou la glorifier, mais l’histoire nous enseigne que cela se passe rarement comme nous le prévoyons. La raison est assez simple : nous projetons des technologies de ruptures sur les usages actuels. Or à chaque rupture technologique, les usages changent.
Article rédigé par Thomas Tayllamin, Chargé de développement commercial à Skema Conseil Lille