C’est le nouveau terme à la mode. Vous l’avez sans doute entendu dans la bouche de vos collègues en quête de nouveaux challenges ou de votre manager désireux d’impulser un projet novateur au sein de votre équipe. Mais au fond, de quoi parle-t-on ?
Il s’agit d’entrepreneuriat interne à l’entreprise. De plus en plus convoité, il permet aux salariés de porter des projets innovants au sein de leur organisation tout en conservant leur statut et leurs tâches habituelles. Il est en réalité question de « travail de fond ».
Associé depuis près de 40 ans à la Success Story d’Arthur FRY, l’intrapreneuriat se développe aujourd’hui en dehors de son cadre premier et se révèle être plus normé que la belle histoire de 3M le laisse paraître. de plus en plus en PME et présente un fort potentiel en start-up. Le rôle de l’intrapreneuriat tend à se développer de manière croissante dans les entreprises. En effet, l’accroissement du nombre de start-up ainsi que leur performance ne déméritent pas et donnent des idées aux entités historiques.
Ainsi, de nombreux grands groupes déploient des incubateurs à start-up en interne et mettent en place des challenges pour innover : challenge innovation et hackathon par exemple.
C’est d’ailleurs le cas de GRDF Ile-de-France qui, en association avec La Ruche, a organisé les 19 et 20 juin derniers le Hackathon « Open Innovation », axé sur trois thématiques différentes (Management, Digital et relation client, Smart Cities). Deux membres de Skema Conseil Paris ont participé à ces ateliers en tant que consultants.
L’INTÉRÊT POUR L’ENTREPRISE …
L’intrapreneuriat est l’exemple type de la mise à profit de l’intelligence collective en entreprise. Cette utilisation approfondie des ressources humaines disponibles au sein de l’entreprise évite des coûts excessifs liés à l’intervention de prestataires. Les collaborateurs internes sont parfois plus à même de cerner les problématiques et enjeux de leur entreprise auxquels ils se confrontent au quotidien.
La mise en place d’hackathons, challenges innovation et autres « labs » évite également les rachats coûteux de start-up, qui ne sont pas toujours viables sur la durée. En plus des avantages pécuniaires, l’intrapreneuriat peut être source d’un gain de motivation et d’implication pour les salariés qui en sont à l’initiative. Il peut devenir un argument de poids pour une entreprise cherchant à recruter de nouveaux talents et limiter le turnover de ses effectifs. La reconnaissance de l’employé est un sujet au cœur de nombreuses problématiques actuelles. L’adaptabilité des temps et cadre de travail se sont développés avec l’avènement des GAFAM. Elle s’accompagne de nouvelles formes d’organisations hiérarchiques. Le management horizontal gagne notamment en popularité et favorise grandement les projets intrapreneuriaux.
… ET POUR L’EMPLOYÉ
En effet, le marché du travail est de plus en plus dense. Un grand nombre de demandeurs et d’offreurs se battent pour des places qui sont chères d’un côté comme de l’autre. Face à une montée constante d’entrepreneurs indépendants et de start-up, poussées par l’essor des incubateurs et espaces de coworking (La Ruche, Numa, Station F pour ne citer qu’eux en région parisienne), les grandes entreprises doivent s’adapter pour continuer d’attirer les esprits novateurs et porteurs des projets disruptifs. Ainsi, l’intrapreneuriat, illustré par les différentes démarches citées précédemment, se positionne comme la solution idéale face à l’attrition et à une capacité d’attraction en perte de vitesse.
En laissant l’opportunité à ses employés de porter des projets annexes en interne, l’entreprise leur accorde une liberté qu’ils n’ont pas dans leur exercice habituel, qui de plus est motivante et gage de reconnaissance. La diversification de ses tâches permet au « chef de projet » de sortir d’une routine parfois lassante et de prendre goût à de nouvelles responsabilités. La réalisation d’un projet intrapreneurial peut susciter un fort sentiment d’appartenance et d’engagement « corporate » à l’opposé de l’implication minimale souvent déplorée par les managers. La gestion d’un planning et d’un budget s’avère responsabilisante et entraîne la fierté personnelle et la reconnaissance des supérieurs de l’intéressé. C’est d’ailleurs grâce à de telles initiatives que l’intrapreneuriat s’est révélé être un accélérateur de carrière pour de nombreuses personnes. Toutefois, la juste mesure du retour sur investissement des projets intrapreneuriaux n’est pas évidente à déterminer et dépend de certains facteurs clés de succès.
LES FACTEURS CLÉS DE SUCCÈS
L’initiative est une chose, l’utilité de celle-ci en est une autre. Pour que l’intrapreneuriat fonctionne en entreprise, il faut qu’il soit conduit par de réelles motivations et qu’il réponde à une vraie problématique : un besoin de changement, la nécessité de créer une entité interne évitant des coûts de sous-traitance, la sortie d’un nouveau produit ou d’un service lié et crucial au produit existant. Il faut cerner un besoin tangible et y apporter une réponse utile.
Et pourtant, même avec une conviction certaine de la nécessité d’« intraprendre », il faut solliciter la direction et provoquer son implication. Il ne s’agit pas là de négocier auprès de son « N+1 » mais de convaincre les têtes pensantes de l’entreprise, celles à même d’allouer un budget et qui ont suffisamment de recul sur la firme pour cerner des problématiques larges qui ne dépendent pas du champ d’action du « middle management ».
Ce sont d’ailleurs ceux-ci, les responsables intermédiaires, qui posent parfois problème. L’employé portant, en plus de son travail, la casquette du chef de projet doit continuer à réaliser ses objectifs de poste sans pour autant délaisser son projet transverse dont les dirigeants attendent des résultats. Le manager direct se sent alors court-circuité et peut s’avérer gênant, d’où la nécessité de cultiver cette politique d’intrapreneuriat au sein de l’entreprise et de communiquer en interne dans ce sens.
Quoi qu’il en soit, il faut garder en tête que la marque employeur et la marque entreprise doivent aller dans le même sens, en tenant un discours commun et attractif, avant et après l’entrée des employés dans l’entreprise.
À noter toutefois que pour « intraprendre », une vision suffisamment large des problématiques managériales et corporate est nécessaire, ainsi qu’une volonté de faire grandir l’entreprise, et que par conséquent, tout le monde n’y est pas disposé.
Article rédigé par Robin GIRARD, Chargé de Développement Commercial à Skema Conseil Paris.