La crise de la Covid-19 et la digitalisation du livre papier ont menacé les librairies physiques. Celles-ci ont connu, pendant les confinements successifs, des pertes qu’elles ont tant bien que mal compensées grâce aux ventes de décembre. Dans le quartier latin, Gibert Jeune a fermé et Gibert Joseph s’est séparé de plusieurs employés. Cette défaite laisse planer le spectre de fin du livre papier et terrorise tout lecteur qui voit la digitalisation s’accélérer. Le livre papier peut représenter une tradition par rapport à une nouveauté pourtant moins encombrante.
Pourtant, beaucoup sont les lecteurs qui refusent de digitaliser leurs livres et préfèrent garder la preuve matérielle de leur attachement. D’autres n’hésitent pas à sauter le pas. Quelles peuvent être les tendances de ce marché qui oscille entre la tradition du papier et la séduction du tout numérique ? Quels sont les avantages concrets de l’un et de l’autre ? Quelles en sont les tendances internes et comment en tirer profit ? Ce sont les questions qui sous-tendent cet article.
La digitalisation offre l’avantage d’une économie de papier, d’une concentration phénoménale de textes sous le format physique d’une tablette plus fine que la plupart des livres de poche. Certains y voient une perte de charme par rapport au livre papier tandis que le marché de ce nouveau format ne cesse de croître, à la fois sous sa forme écrite comme sous la forme de livres audio. Quelle est l’influence de ce nouveau marché ? Il est certain que le livre papier perd en vitesse par rapport à ce marché novateur.
On compte par exemple une augmentation de 1,69% en 2019 des livres scolaires. En parallèle, l’édition numérique a vu ses ventes croître de 9,2% sur la même année (chiffres du Syndicat National des Éditeurs). Il faut aussi noter le rôle de nouvelles plateformes comme Wattpad. À travers cette application, les écrivains en herbe évitent de passer par la case de sélection d’un éditeur avec l’envoi de centaines de manuscrits avec un nombre quasiment égal de refus ou simplement d’absences de réponse. En effet, ces derniers peuvent soumettre directement le texte à la foule de lecteurs, afin d’obtenir un potentiel succès. Il est certain qu’il est ainsi plus facile de publier directement sur internet plutôt qu’à compte d’auteur.
Un entrepreneur qui souhaiterait lancer un quelconque projet dans ce domaine devrait donc s’intéresser à cette dimension. Même en considérant des lectures libres de droit, le marché du livre papier perd en vitesse par rapport à ce nouveau marché. Celui-ci permet par exemple la réédition de romans-fleuve trop longs comme Artamène ou le Grand Cyrus, qui n’ont plus été publiés depuis le XVIIème siècle. Il nuit surtout au livre de poche et à tout format qui se veut économique. On comprend alors que le devenir du livre papier est celui de l’esthétique, de la collection. Il ne s’agit plus du livre en tant que texte mais du livre en tant qu’objet représentant l’intérêt porté au texte même. Il faut d’ailleurs compter le charme du livre papier qui, dans la lecture d’un texte que l’on sait apprécier, est plus valorisé que la lecture dématérialisée.
Il existe à ce jour 15 000 lieux de vente qui commercialisent régulièrement des livres papier. Parmi eux, entre 3 500 et 4 500 commerces se sont spécialisés entièrement dans cette activité en France. Ainsi, ce secteur représente 80 000 personnes dont des salariés, dirigeants et entrepreneurs. Du côté des lecteurs, une étude menée par Statista permet de montrer que sur l’année 2021 53% des lecteurs lisent sous format papier tandis que 18% sont passé au digital.
Il faut ainsi se poser la question des avantages du livre papier malgré les avantages concurrentiels du livre numérique. La lecture d’un livre papier est donc toujours plus qu’un texte lu. C’est une page effleurée, une odeur de papier, une ambiance qui se constitue autour de ce moment sacralisé. La digitalisation apporte certes un grand nombre d’avantages, mais elle nuit à cet aspect de sacralité du texte. Un texte apprécié est toujours celui qui sera mis en valeur dans notre bibliothèque, celui que l’on relira avec solennité.
L’aspect esthétique du livre papier est aussi important que la possibilité de le lire de manière traditionnelle. L’avenir du livre papier se situe dans cette fine appréciation du texte et de l’esthétique traditionnelle des livres reliés. Personne ne peut s’y tromper en regardant les résultats des grands éditeurs et de leurs éditions phares. Un Gallimard fonde son chiffre d’affaires sur les volumes de la prestigieuse édition de la Pléiade. Un cuir en pleine peau, des lignes en or fin 23 carats, du papier bible de qualité, voici la recette de la Pléiade. C’est cette édition de luxe très rentable, si l’on compare la quantité de texte au prix général, qui est pour Gallimard une véritable vache à lait alors même que son chiffre d’affaires fondé sur les livres plus classiques est en baisse générale.
Nous voyons alors les enjeux du livre papier : la disparition du livre pour son texte, remplacé par le livre pour son esthétique et sa valeur sentimentale. Il reste toutefois à évaluer clairement ces volumes de marché, les subtiles nuances qui sous-tendent les évolutions rapides du livre papier et électronique. Que deviendra le livre ? L’avenir en décidera, mais il est à parier qu’il penchera du côté du luxe ou du numérique. Tout entrepreneur devrait alors se positionner sur ces deux axes et évaluer son potentiel. Cela est possible en réalisant une étude de marché sur ces deux secteurs.
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Références :
https://www.idboox.com/etudes/marche-du-livre-en-france-chiffres-cles-papier-et-ebooks-2015/
https://www.sne.fr/economie/chiffres-cles/
Rédigé par Gabriel BOURDIN-DEFILLON